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Photo du rédacteurJeanne Roy

Déjouer l’anxiété en favorisant la colère et ses bienfaits



L’anxiété est un mélange de plusieurs émotions dont la peur, la colère et la tristesse. Ces émotions sont en quelque sorte bloquées et apportent des sensations d’étouffement ou d’étranglement, des engourdissements ou des picotements, des serrements ou des douleurs à la poitrine, des palpitations cardiaques, des maux de ventre, de la fatigue…


Nous ne naissons pas anxieuse ou anxieux. L’anxiété prend forme au cours de la petite enfance. Elle est une conséquence de l’incompréhension du rôle des émotions (surtout la colère!). L’enfant naît avec des émotions primaires mais il ne possède pas le « dispositif » pour les exprimer avec des mots. Ce dispositif va se construire à partir des réponses ajustées à ses besoins, à son stress et à ses émotions.


Vu l’immaturité de son cerveau, quand l’enfant fait une colère, il est dérouté et il a peur. De plus, elle est 1000 fois plus intense que chez l’adulte. C’est une vraie tempête. Il lui est impossible d’y faire face seul. Il a besoin d’adultes significatifs et compréhensifs.


Malheureusement, il arrive que cette colère provoque chez le parent une envie de la faire taire, de la critiquer, de la dénigrer.  Cette répression de l’énergie de la colère s’accumule peu à peu à l’intérieur de l’enfant entraînant le « stockage » de la peur (peur de mal faire, peur de déplaire, peur de perdre son parent, peur de ne plus être aimé), de la tristesse (peur de faire de la peine et peiné de ne pas être entendu) et de la colère (peur de la ressentir et de l’écouter). Cette impossibilité de faire accepter sa colère va se traduire par des signes de désarroi.


Alors comment faire pour aider un enfant à ne pas développer de l’anxiété? Il s’agit tout simplement d’être là pour sa colère et de lui garantir ton soutien.


Quelques points de repère

Voir la colère à travers les lunettes des neurosciences affectives et sociales :


  • L’enfant ne décide pas d’être en colère, elle vient toute seule. Il ne fait pas une crise, il se retrouve en crise. (1) Elle se déclenche dans les parties du cerveau spécialisées dans les sensations et les émotions. C’est très puissant, apeurant et désagréable. De plus, elle entraîne des hormones de stress qui doivent être évacuées pour ne pas être nocives. Son corps est aux commandes : pleurs, cris, « gros mots », taper, lancer, se jeter par terre, mordre. Il n’a pas encore les mots pour dire qu’il n’en peut plus, qu’il est blessé, frustré, qu’il n’a pas envie et qu’il a sa propre volonté.

 

  • Une frustration, un obstacle (un enfant vit énormément de contraintes), un manque, une injustice entraînent automatiquement des sensations de bouillonnement et de grandes tensions. Son corps se met en mouvement pour exprimer ce qui ne va pas et ce dont il a besoin.

 

  • Essayer de le raisonner ne marche pas. Son cerveau pensant est en formation.  Ce qui marche, c’est de rester avec lui et de refléter ce que tu vois et entends. S’il y a injustice, la reconnaître et réparer. S’il est frustré parce qu’il voulait tellement une chose ou une activité, reconnaître son désir et mentionner que c’est dur de ne pas avoir ce qu’on souhaite (je ne veux pas dire qu’il faut lui donner). S’il est mécontent parce qu’il voulait rester à la maison, reconnaître sa déception et verbaliser que c’est dur de renoncer.

 

  • À la suite des manifestations de colère de l’enfant, l’adulte a le pouvoir de changer les choses qu’il peut changer. Il a aussi le pouvoir d’amener l’enfant à accepter les choses qui ne peuvent pas changer. Accepter ne signifie pas se résigner. L’acceptation est un processus où la colère de l’enfant est légitimée, et les larmes sont accueillies dans les bras de l’adulte comme un signe d’assentiment. Je répète c’est un processus. Il faut du temps, de la répétition, de la patience et une connexion au ressenti. La validation de la colère et de la peine crée chez l’enfant le sentiment qu’il est accepté et reconnu pour ce qu’il est. L’anxiété n’a pas de prise.


Voir autrement amène un changement d’attitude

  • Nous avons appris (enfance, livres éducatifs, culture) que la colère « ce n’est pas beau », c’est mauvais, c’est nuisible. Les méthodes telles que ignorer l’enfant, le punir, le réprimander, le mettre dans sa chambre, correspondent à cet apprentissage.  

 

  • Un enfant en colère représente un défi pour l’adulte. Il doit composer avec ses « idées reçues » et ses propres émotions (qui souvent n’ont pas été entendues quand il était enfant). Ce n’est pas simple mais stimulant. Qui ne veut pas se défaire d’un conditionnement et être sensible à ses émotions?

 

  • ·Savoir que la colère de l’enfant passe par le corps et que c’est d’abord par le corps de l’adulte (sa présence, ses yeux, sa posture) que l’enfant peut se détendre. Un grand corps paisible se connecte à son petit corps, et fait baisser instantanément son niveau de stress. L’enfant est moins envahi, il se sent en sécurité et son cerveau pensant peut plus facilement enregistrer les mots qui correspondent à ses sensations et émotions.



 

  • Être tout près de l’enfant dans une posture d’acceptation fait fuir l’anxiété. Elle ne peut se loger dans le corps, le cœur et l’esprit de l’enfant. Parce qu’il peut laisser sortir en toute confiance sa colère, il ne la refoule pas et son énergie circule librement.

  

  • Permettre à l’enfant de vivre sa colère en toute sécurité, lui donne les outils pour progressivement s’autoréguler.

 

Apprendre à écouter la colère pour prendre soin de nos besoins, pour protéger notre espace vital, pour s’affirmer en tout respect de soi et de l’autre, voilà les bienfaits d’une colère saine (sans répression et sans explosion). Quel beau cadeau pour la vie!

 


 

Si tu désires mieux connaître la colère, j’ai découvert le livre de Monique de Kermadec. Osez la colère. Dis-moi quelle est ta colère, je te dirai qui tu es. pp. 9-146


Si tu désires approfondir l’immaturité chez l’enfant, je te suggère le livre de Sarah Hamel. Le ti-pou d’Amérique. Mieux comprendre pour mieux intervenir. (1) p. 38

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